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    NB : Ces conseils ne constituent ni une recette ni une méthode unique. Chaque professeur propose ses propres formulations pour mettre en valeur des exigences similaires relatives à l'exercice de la dissertation.

    A. Au brouillon

    I. L'analyse du sujet

     

    Lire l’intitulé : Il n’est pas exagéré de dire que l’ensemble de la dissertation repose sur ce premier point. Toutes les copies hors-sujet (ou ne traitant pas tout le sujet) proviennent d’une lecture hâtive de l’intitulé. « Lire un intitulé » c’est déceler ce qui fait sa spécificité.

    Comment lire un intitulé ?

     D’une part en le comparant à des sujets qui, tout en étant proches, diffèrent de lui (plus vous répétez ce geste, plus vous vous rapprochez de ce qui est essentiel dans ce sujet). Ex : « faut-il désirer la vérité ? » ce n’est ni « faut-il rechercher la vérité ? », ni « peut-on désirer la vérité ? ».

     Ensuite en définissant les termes de l’intitulé : cette opération accompagne la première. Puisque pour spécifier l’intitulé, il faut définir les concepts qu’il contient.

     Il faut d’autre part être attentif à la manière dont la question est posée et au(x) présupposé(s) que celle-ci contient.

     Enfin il faut dégager les différentes dimensions de l’intitulé : souvent, il n’y a pas une seule lecture possible de l’intitulé. La question (ou l’expression) proposée peut contenir plusieurs sens. Ex : « peut-on toujours faire tout ce que l’on veut ? » signifie tout à la fois : 1. A-t-on toujours la capacité (physique ou psychologique) de faire ce que l’on veut ? et 2. A-t-on toujours le droit (est-il toujours légitime) de faire tout ce que l’on veut ?

     

    II. La mise en place du questionnement 

    A ce stade seulement (après avoir analysé l'intitulé), il devient possible de chercher quels sont les problèmes impliqués par l’intitulé. Cette recherche doit vous permettre de dégager une série de questions (et de réponses potentielles) qui se relient entre elles. Evidemment, le questionnement ne doit pas être passif. Souvent s'impose l’impression que l'intitulé ne renvoie à aucun problème (qu'au fond il n'y a qu'une seule réponse possible, qui plus est évidente) ; c'est évidemment une impression trompeuse que l'exercice de la dissertation a justement pour but de dépasser. Il faut donc apprendre à questionner un sujet (en instaurant une sorte de dialogue intérieur entre soi et soi-même, dialogue que l’on peut retranscrire au brouillon : si…alors, oui mais… donc… etc.).

    Une fois les différentes difficultés du sujet mises en valeur, tentez de synthétiser celles-ci dans une (voire deux ou trois) questions centrales : ce sera votre problématique (moment important de l'introduction – voir sur ce point le passage sur l'introduction).  

    Enfin, essayez de dégager l'enjeu ou les enjeux du sujet, c'est-à-dire l'intérêt général qu'il peut avoir dans tel ou tel domaine (pour la science par exemple, ou pour la morale, pour la politique, etc.).

     

     

     

    III. L'orientation générale

    À l'issue de la première étape, vous devriez donc a) avoir analysé en profondeur les termes de l'intitulé, b) avoir établi une liste des différentes questions soulevées par cet intitulé, c) avoir cerné une problématique possible et le ou les enjeux essentiels du sujet proposé. Il faut donc à présent organiser ces données afin de construire une progression (le correcteur doit comprendre l'ordre de votre exposé, la raison pour laquelle telle question essentielle est traitée avant ou après telle autre). Cette progression sera en fait le squelette de votre futur plan détaillé. Afin d'établir cette progression, il faut tout d'abord partir des grandes interrogations qui se dégagent de votre analyse de l'intitulé.  

    Attention ! Ces grandes interrogations délimitent votre réflexion (et donc doivent normalement vous éviter le hors sujet). Pour autant, elles ne constituent pas encore une progression logique d'ensemble. Mais, afin d'établir cette dernière de la façon la plus rigoureuse possible, il faut justement vous demander quelle est l'orientation générale la plus apte à réunir et articuler ces grandes interrogations dans une même progression logique. Ensuite, pour organiser cette progression logique en différentes parties, plusieurs types de plan sont à votre disposition. Nous n'en évoquerons ici que deux, mais il faut insister sur le fait que de nombreux autres types de plan sont évidemment acceptables du moment qu'ils traitent le sujet précisément et progressivement.

    Premier exemple de plan : Le plan dialectique (thèse, antithèse, synthèse) : le plan dialectique est tout à fait possible. Mais, au risque de répéter ce que vous avez déjà dû entendre, un plan dialectique ne doit en aucun cas devenir un "oui/non/peut-être".

    D'une part, un plan dialectique implique une progression : si l'on répond par l'affirmative puis par la négative, ou l'inverse, c'est que la compréhension même des termes de l'intitulé évolue, dévoilant graduellement de nouveaux aspects du sujet.

    D'autre part, un plan dialectique implique un dépassement dans la troisième partie : il faut non pas simplement faire une pseudo synthèse qui n'apporte rien de nouveau – oui parfois, non parfois – mais il faut parvenir à montrer que les deux premières réponses (l'affirmative et la négative) sont réductrices car elles manquent en partie la véritable origine du problème (origine que la troisième partie a justement pour fonction de dévoiler).

    Si vous n'êtes pas certain que votre plan dialectique possède ces deux caractéristiques, ce n'est pas un plan dialectique mais un plan au rabais... Dans ce cas, choisissez un autre type de plan.

     

    Second exemple de plan : Le plan articulé autour de la distinction entre le droit et le fait : ce type de plan, tout à fait envisageable avec certains types de sujet, met en valeur l'écart qu'il existe entre une situation théorique (en droit, cela devrait être ainsi) et des situations réelles particulières (de fait, ça se passe parfois ainsi). Ce type de plan réclame tout d'abord une grande précision dans la définition de la situation théorique ; en clair, cela implique, dans un sujet, d'expliquer très rigoureusement pourquoi quelque chose devrait en droit, c'est-à-dire en vertu de sa définition même (de sa nature, de son essence), être comme ceci ou comme cela. Et ce type de plan exige ensuite une grande précision dans l'exposition et l'analyse des situations plus particulières.

    Ajoutons qu'une troisième partie est souhaitée dans la mesure où il faut rechercher l'origine de ce décalage entre le droit et le fait ; cela, afin de se demander si ce décalage est voué à rester permanent (et, dans ce cas, ne faut-il pas tout simplement revoir l'affirmation générale de départ puisqu'elle ne correspond pas à la réalité ?) ou s'il peut à l'inverse être réduit (et dans ce cas, par quels moyens ?).

     

    IV. Nourrir son plan : Les références et les outils conceptuels

    L'orientation générale est nécessaire mais non suffisante pour construire une dissertation digne de ce nom. Il ne suffit évidemment pas de rendre votre réflexion progressive et structurée ; encore faut-il la nourrir avec des analyses précises. C'est à ce niveau qu'il devient inévitable de réunir vos connaissances (références, concepts, arguments, exemples) sur les thèmes abordés dans le sujet.

    Rechercher donc vos connaissances : sélectionnez les doctrines, analyses, textes, distinctions conceptuelles, exemples qui vous paraissent les plus appropriés pour les différents moments de votre questionnement. NB : cette recherche n’est pas simplement formelle. Elle doit vous permettre de vérifier que vous n’avez pas manqué un aspect du sujet (si une thèse philosophique semble s’imposer pour ce sujet et qu’elle ne correspond à aucune de vos questions-réponses mises en valeur préalablement, c’est certainement que votre réflexion n’a pas été poussée assez loin).

     

    V. Le plan détaillé

    Votre plan possède donc à présent son orientation générale, ses grandes parties, et vous avez par ailleurs des références pour nourrir votre réflexion. Il faut donc maintenant structurer en détail votre devoir dans le détail afin qu'il possède un ordre interne visible. Pour cela, il faut classer les données acquises jusqu'ici afin d'obtenir des sous-parties cohérentes et homogènes. En d'autres termes, il ne faut pas que des aspects complètement différents du sujet soient mélangés dans une même partie, et il ne faut pas que la disproportion entre les parties soit trop importante. C'est seulement à ce prix que vous obtiendrez de véritables sous parties (deux ou trois sous-parties par partie sont nécessaires).

     

    VI. Vérification générale avant la rédaction : trois grandes questions à vous poser avant de commencer à rédiger. A. Ne suis-je pas hors-sujet ? B. N’ai-je pas oublié un ou plusieurs aspects du sujet ? C. le sujet est-il suffisamment spécifié (ne suis-je pas trop vague ?) ?

     

    B. La rédaction

    I. Principes évidents (valables pour la dissertation et le commentaire) :

     - Ecrire lisiblement et dans un français correct

    - Pas de style télégraphique ou d’abréviation

    - Soigner la mise en page

     

    II. Configuration d’une dissertation

    Introduction

    Première partie

    2 ou trois sous-parties

    Transition

    Seconde partie

    2 ou trois sous-parties

    Troisième partie

    2 ou trois sous-parties

    conclusion

    NB : espacez entre les parties, entre les sous-parties, etc.

     

     III. Règles de style :

    - Tournures personnelles à bannir. Ex : « moi je », « Oh ! » « Quel grand ! », « Quel beau ! », « j’ai toujours su que », etc.

    - Usage incontrôlé des concepts à bannir. Les concepts relatifs aux doctrines étudiées doivent être compris avant d’être utilisés.

    - Affirmations gratuites à bannir (toute affirmation doit être argumentée !). Ex : « on sait bien que… », « tout le monde partage nécessairement l’idée que… ».

    - Eviter les répétitions (les vraies répétitions, celles qui n’apportent rien de nouveau ; les reprises par contre – qui rappellent l’essentiel de l’argumentation qui précède – sont nécessaires).

    - Soigner les enchaînements, c’est-à-dire le passage d’un problème à un autre, d’une sous-partie à une autre, d’une partie à une autre (les transitions sont essentielles).

    - Souligner le titre des œuvres citées (le titre doit être exact et non approximativement retranscrit).

    - Les citations doivent être introduites au moment opportun (elles ne doivent pas « tomber du ciel »). NB : les citations (la retranscription de passages entiers donc) ne sont pas obligatoires. On peut reprendre les concepts d’un auteur (à condition de citer le nom de l’auteur et de montrer qu’on comprend le sens des concepts en question) sans réciter un passage du texte auquel on se réfère (cette pratique, lorsqu’elle est maîtrisée, est d’ailleurs souvent plus pertinente que la simple citation).

     

    IV. Rédaction de l'introduction  

    Phase A : L’accroche ou mise en contexte

    L'accroche (ou mise en contexte) amène le lecteur (qui n'est pas censé connaître le sujet) à s'y intéresser. Il faut donc trouver une mise en contexte précise et allant au cœur du sujet. Doivent absolument être évitées les formules générales et creuses (« de tout temps », « depuis toujours », etc.) et les développements trop longs (il s'agit d'introduire !). Si vous ne parvenez pas à éviter ces deux écueils, passez directement à la présentation du sujet.

     

    Phase B : La présentation du sujet

    Il ne faut pas se contenter de répéter l'intitulé ou de le paraphraser. Il s'agit plus subtilement de cerner au plus près ce qui est essentiel dans ce sujet, de mettre en valeur en une ou deux phrases (à l'aide d'une rapide « première » définition des notions clés) « ce » sur quoi on s'interroge. La présentation du sujet cerne donc la signification essentielle de l'intitulé.

     

    Phase C : La problématique

    Partie la plus essentielle de l'introduction, la problématique doit mettre en place un questionnement qui délimite votre réflexion sur le sujet. Normalement, cette problématique découle directement des analyses effectuées durant l'étape n° 1 du brouillon. Attention ! La problématique ne doit jamais être la répétition du sujet, mais bien la mise en valeur des difficultés centrales que celui-ci soulève. En d’autres termes, il faut mettre à jour ce qui pose problème, ce qui empêche de répondre au sujet. L'idéal, si l'on y arrive, est de parvenir à la formulation d'un véritable paradoxe, une contradiction centrale qui constitue le coeur du problème.

     

    Phase D : L'annonce du plan

    Une fois la problématique formulée, il s'agit d'annoncer de façon claire et directe les idées directrices du devoir. Il faut donc que le correcteur comprenne, à la lecture de ce plan, les étapes qui vont vous permettre de traiter le questionnement mis en place dans la problématique. On doit donc pouvoir d'emblée lire une progression entre les différentes étapes. Attention ! Si vous avez évidemment tout intérêt à être le moins maladroit possible dans cette phase de l'introduction, l'élégance de la formulation ne doit pourtant pas devenir une priorité par rapport à la clarté. En d'autres termes, il vaut mieux en rester à des connecteurs logiques simples (tout d'abord, ensuite, enfin) plutôt que de perdre le lecteur. Bien entendu, si vous parvenez à une formulation claire et élégante (ce qui demande une longue préparation à l'exercice de l'introduction), le correcteur n'en sera que plus heureux.

     

     V. La rédaction des transitions 

     Elles viennent entre les parties (entre la première et la seconde, puis la seconde et la troisième) et contiennent deux phases :  

    a) récapitulation : On dit ce que l’on a compris du sujet grâce à la partie qui précède, et éventuellement la réponse momentanée que l’on peut y apporter.

    b) relance du sujet : On explique pourquoi le sujet n’est pas encore complètement traité ; on questionne la réponse proposée en soulevant d’éventuelles limites. On annonce ainsi la partie qui vient.

     VI. Rédaction de la Conclusion : Elle n'est en aucun cas un résumé détaillé de tout ce qui a été dit. En revanche, il s'agit de rappeler les grandes étapes de l'analyse (de façon très synthétique) et d'autre part de rappeler la conclusion définitive à laquelle on est arrivé. Enfin, on peut éventuellement (si l'on a quelque chose à dire sur ce point) soit finir sur les enjeux pratiques de la réponse apportée (en montrant en une ou deux phrases quels problèmes concrets elle permet de résoudre), soit montrer en quoi la conclusion définitive soulève elle-même des problèmes qui dépassent le sujet traité.